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Historique de l'orgue de Villerupt
Auteurs de l’instrument : Jean-Nicolas JEANPIERRE, 1856, Charles DIDIER-VAN CASTER, 1895.
Les archives locales, qu’elles soient communales ou paroissiales, ne livrent aucune
information sur les origines de l’instrument, sur lesquelles diverses histoires ont eu cours. Mais l’analyse approfondie de l’instrument, effectuée à la faveur de la demande de protection au titre des Monuments historiques, a permis de l’identifier comme étant l’orgue construit en 1856 par le facteur vosgien Jean-Nicolas Jeanpierre pour les Dames du Très-Saint-Sacrement de Saint-Nicolas-de-Port.
Selon toute vraisemblance, l’ancienne église de Villerupt ne possédait pas d’orgue. Lorsqu’il fut question de l’aménagement de la nouvelle église, achevée en 1902, la paroisse chercha à s’en procurer un en profitant des circonstances favorables : divers instruments d’occasion étaient alors mis en vente en raison de la fermeture des congrégations en 1903, suite à la loi Combes. Elle songea à acquérir l’orgue du pensionnat Saint-Joseph de Longuyon, mis en vente en 1904 par les Frères des écoles chrétiennes. De fait, selon une tradition locale, l’actuel orgue de Villerupt serait l’ancien orgue du pensionnat de Longuyon. Mais cette origine ne peut être retenue. Les frères transférèrent en 1905 leur établissement à Hachy, en Belgique, et y emportèrent leur orgue, construit par la maison Jaquot-Jeanpierre & Cie en 1889. En 1950, cet instrument fut revendu à la paroisse de Fouches, près d’Arlon, où il se trouve toujours (archives de la maison Jacquot, à Rambervillers, dossiers n° 416 et 469, et communication écrite de M. Jean-Pierre Félix).
En réalité, cet instrument a été acheté non à Longuyon mais à Saint-Nicolas-de Port, auprès des Dames du Très-Saint-Sacrement, qui tenaient dans cette ville une école de filles. La musique occupait une place de choix dans l’éducation des pensionnaires et la chapelle était dotée d’un orgue avant 1850. Cet instrument trop modeste fut remplacé en 1856 par un orgue neuf commandé auprès de Jean-Nicolas Jeanpierre, célèbre facteur vosgien établi à Rambervillers. Cet instrument comportait 14 jeux répartis sur deux claviers et une pédale en tirasse. La composition n’est pas connue avec certitude mais devait être assez proche de celle-ci :
I Positif
(56 notes, C-g’’’)
Bourdon 8
Gambe 8
Flûte à cheminée 4
Dulciane 4
Basson-Hautbois 8 B+D
Clarinette 8 ?
II Grand-orgue
(56 notes, C-g’’’)
Bourdon 16
Montre 8
Flûte harmonique 8
Prestant 4
Flûte 4 ?
Doublette 2
Mixture ?
Trompette 8 B+D
Pédale
(25 notes, C-c’ ?)
Sans jeu propre.
Accouplements I/II et II/I (pédale à trois positions)
Tirasses I et II
L’entretien de l’instrument fut assuré par la manufacture de Rambervillers, jusqu’en 1894, à la séparation entre les deux associés de la maison Jaquot-Jeanpierre & Cie, à savoir Théodore Jaquot, le gendre et successeur de Jeanpierre, et Charles Didier. Le 8 novembre 1894, les sœurs de St-Nicolas-de-Port écrivirent à Théodore Jaquot qu’elles s’adresseraient dorénavant à Charles Didier pour l’entretien de leur orgue. De fait, Charles Didier-Van Caster entreprit en décembre 1894 des “travaux de restauration et d’agrandissement” et ce fut son premier ouvrage comme
facteur indépendant. Il posa trois jeux neufs (Gambe 8, Flûte octaviante 4 et Euphone 16), réharmonisa la tuyauterie de Jeanpierre en la dotant d’entailles de timbre et renouvela la console.
Ces travaux furent réceptionnés et inaugurés le mardi 15 janvier 1895 par Auguste Kling, organiste de Saint-Epvre de Nancy.
Le transfert à Villerupt intervint vers 1905 et fut probablement assuré par Charles Didier-Van Caster, qui semble avoir posé un Clairon neuf au grand-orgue, peut-être pour tenir compte des dimensions de l’église, assurément plus grande que la chapelle de Saint-Nicolas-de-Port.
Alors que les orgues de l’arrondissement de Briey furent vidés de tous leurs tuyaux en métal en 1917, celui de Villerupt ne dut céder que ceux de la façade. Cette anomalie administrative peut s’expliquer par le fait que Villerupt jouxte le département de la Moselle, alors annexé, où seuls les tuyaux de façade furent réquisitionnés en 1917, et que l’administration allemande a semble-t-il appliqué le régime mosellan à Villerupt, en ne réquisitionnant pas tous les tuyaux de métal comme dans le reste de la France occupée.
Ces tuyaux de façade furent remplacés en 1929 par la maison Jacquot, de Rambervillers, qui en profita pour ajouter une Montre 16 au grand-orgue, un Cornet d’occasion au récit et une Soubasse 16 empruntée au Bourdon 16 du grand-orgue. Des dommages de guerre furent réparés en 1947 par un amateur. En 1962-1963, l’abbé Pigeon recula l’orgue de 140 cm pour gagner de la place à la tribune.
En 1990, la municipalité envisagea de faire restaurer l’instrument, laissé à l’abandon depuis de nombreuses années, mais rien ne se fit. Ce n’est qu’en 1998 qu’une association des amis de l’orgue fut créée à Villerupt et que le conseil municipal demanda la protection de l’orgue, qui aboutit à son classement par arrêté du 10 novembre 2000
Christian Lutz
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